Elle
est belle, vraiment belle, maintenant.
Une
silhouette blanche, spectrale, une peau presque phosphorescente dans
l'ombre des arbres, un sein découvert, exhibant un mamelon encore
pourpre, un autre sein à moitié masqué par une robe rouge,
assortie à une chevelure de rouille... alanguie, paisible, elle fixe
le ciel de ses yeux verts et lui offre sa blancheur d'ivoire, comme
un présent ultime, une offrande funèbre.
Ma
poitrine est serrée d'émotions contradictoires. Quand je l'ai
rencontrée, elle n'était pas si parfaite. Je l'ai transcendée ;
j'ai révélé au monde sa véritable beauté, tel un artiste. De cet
acte si vil en apparence est née l'image la plus pure, la plus
aboutie de cette femme.
Je
n'ai pourtant rien calculé, tout s'est produit si vite. Mais le
talent est inné, il s'affirme en dehors de toute volonté, seul le
travail décide de la qualité du résultat. Je devrais m'enfuir, me
pâmer de honte, et si je l'avais sali, ce serait fait. Non, elle est
trop belle, maintenant, pour m'inspirer des remords, encore moins des
regrets...
Elle
était là, assise au bord de l'eau, le menton posé sur les genoux.
Elle fixait le courant, perdue dans ses pensées. Sa chevelure
bouclée se fondait presque dans l'écarlate de sa robe, et ses
mollets par leur pâleur d’albâtre, déchiraient les ombres. Un
peintre aurait pu immortaliser cette scène. Il l'aurait intitulé
« Venus au bord de l'eau »...
M'a-t-elle
senti dans son dos, le cœur battant, les entrailles nouée de
désir ? Probablement pas, même si chacun de mes pas froissait
les feuilles mortes. Nous étions seuls, dans cette forêt, retirés
de la société et de ses règles. Je n'ai pas réfléchi, mû par
l'inspiration du moment. Son calvaire n'a pas duré longtemps,
j'étais trop ému, trop empressé, pour élaborer un acte durable.
Le
résultat me comble d'horreur et d'extase.
Je
remonte mon pantalon...
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