samedi 3 juin 2017

From outer space

Nous nous écrasâmes sur Terre, Emmy et moi, en plein jour, au nez et la barbe de tous les radars. Notre capsule fendit le ciel par un temps splendide, au-dessus d'un paysage idyllique qui, sur le moment, nous indifférait totalement. Seule nous importait la violence de l'impact. Elle fut brutale, et c'est peu dire. La carlingue fut liquéfiée, ratiboisée. Notre habitacle résista, mais vu la température, je savais que nous devrions en sortir au plus vite. J’empoignai ma sœur à bras le corps pour la projeter hors de la cabine. Elle fut épargnée. Pas moi. L'explosion me souffla de plein fouet. Je fus expulsé sur près d'une centaine de mètres, gravement brûlé. La douleur, je pouvais gérer, c'était facile. Après plusieurs décennies à creuser dans la roche avec mes mains, au fond d'une mine, je m'étais endurci. Par contre, je n'avais jamais eu à subir de handicap durable, et visible. Ces brûlures m'avaient ravagé. J'étais devenu pour les autochtones de cette planète, d'une laideur repoussante. Même pour Emmy, ce qui était bien plus traumatisant. J'aurais aimé lui paraître agréable, voir dans ses yeux, lors de nos rencontres, un peu d'affection. Avec ce faciès d'épouvante, cela relevait de l'impossible. Même avec la meilleure volonté, elle ne pouvait plus m'approcher comme autrefois. C'était au-dessus de ses forces, et je le comprenais.
Les anciens avaient vu juste. Ces terriens nous ressemblaient. En interne, nous possédions deux cœurs, trois cerveaux, quatre reins, huit poumons, toutefois d'apparence, n'ayant pas d'excroissance ou d'organe saillant, nous pouvions nous fondre parmi la population.
Emmy fut très vite acceptée par les habitants du bourg où nous trouvâmes refuge. Plutôt jolie, elle fit l'unanimité, surtout du côté des mâles... tandis que moi, j'inspirais le dégoût, et souvent la peur. J'étais grand et puissant, mes mains ressemblaient à des haches, j'aurais dû plaire ; au lieu de cela, d'aucuns voyaient en moi une menace, à cause de ce visage détruit.
Je m'attendais au rejet en arrivant ici. Nos pairs nous avaient prévenu. J'enrageais de devoir le subir à cause de ma « sale gueule » plutôt que de ma nature extraterrestre. J'aurais pu échapper à cette explosion, si je n'avais pas perdu du temps...
Je jalousais Emmy. Elle avait vite trouvé un compagnon, et s'était installée à la campagne dans une belle maison. Pour ma part, sans travail, sans amis, sans amours, j'errais dans les rues, épié par des passants méfiants ou hostiles.

Quitter cette planète n'est plus possible. Je savais dès le départ que le voyage serait un aller simple.
Cette nouvelle vie aurait pu me sourire, je n'ai pas eu de chance. Qu'à cela ne tienne ! J'ai pris ma décision.
Je suis parti en Angola. Ici, il existe encore des mines de diamant.

Je possède certaines compétences, alors foutu pour foutu, autant ne pas les perdre...