La stagiaire finissait de
déglutir avec une grimace de dégoût lorsque les premières bombes
apparurent sur l'écran radar. Représentées par des points rouges,
elles décrivirent une courbe gracieuse vers les lignes vertes
délimitant la Corée du Nord.
Le président des
Etats-Unis d'Amérique reboutonna son pantalon avec un sourire
carnassier. Enfin, ce foutu pays de jaunes à la con allait subir le
courroux impérial des United States ! Et ce merdeux de Kim
« chaipasquoi » finirait comme ces autres tarés, Saddam
Hussein, Ben Laden, au fond d'un trou de glaise dégueulasse !
La flotte se découpait
sur fond noir en des dizaines d'ovales, qui encerclaient la misérable
presqu'île, dont la forme lui évoquait un pénis rabougri par le
froid. Il ricana intérieurement, sûr de sa puissance et de sa
sécurité.
Son QG flottant mouillait
très en retrait, près des côtés de l'île de Guam. En cas de
riposte, les anti-missiles feraient le boulot ! Outre le radar,
certes jouissif mais un peu austère, deux écrans géants
proposaient des vues plongeantes sur les terres de ce maudit pays.
Les impacts furent discrets, au début. De brèves lumières, puis un
peu de fumée. Ensuite, les dégâts, les bâtiments qui
s'effondrent, creusant de profonds cratères.
Aucune ogive n'était
nucléaire, il s'agissait d'une salve ferme d'autorité.
Donald Trump pressa le
bouton de son téléphone.
— Alors, général,
quelle réaction ?
— Aucune, monsieur le
président. Pas la moindre défense ou riposte.
Le robuste chef de la
première puissance militaire du monde riait cette fois ouvertement.
Ce minable coréen n'avait même pas assez de couilles pour ne
serait-ce qu'essayer de résister! Dommage. Il aurait aimé davantage
d'action !
— Préparez le feu
nucléaire !
Pas question de reculer.
Cette immobilité était destinée à l'endormir. Il était venu pour
fumer ce pays, il allait le fumer.
— Etes-vous sûr,
président ? La Chine et la Corée du Sud risquent de ne pas
apprécier...
— Epargnez-moi vos
jérémiades ! S'ils ne sont pas contents, je les réduits en
poussière, eux aussi !
Le protocole enfin
respecté, ou presque, le chef d'état ordonna le tir d'une dizaine
d'ogives, toutes à destination du cœur du pays. Les objectifs des
caméras satellites zoomèrent sur les lieux promis à extinction.
Trump sentit un
frémissement au niveau des bourses. Il se leva et se posta devant la
stagiaire, qui compris aussitôt où il voulait en venir. Sur le
radar, les dix points rouges approchaient de leur destination. Le
moment tant attendu était imminent. Le souffle tiède de Selena
frôla sa chair. Elle le caressa du bout de la langue. Les bombes
percutèrent le sol.
Et sur les écrans,
aucune explosion ; tout au plus un séisme. Trump délaissa la
stagiaire et s'approcha des images diffusées en temps réel. Les
infrastructures s'effritaient, des fissures se formaient, entraînant
les gravats dans les profondeurs. Les ogives semblaient absorbée –
avalées ? - par la terre coréenne. Et comme pour confirmer
cette folie, des excroissances étranges jaillirent des éboulements,
longues et caoutchouteuses, semblables à des tentacules. La vision
trop rapprochée empêcha d'en voir davantage.
Le président des
Etats-Unis d'Amérique courut à son interphone, les jambes entravées
par le pantalon défait, et demanda :
— D'où vient ce
bordel ? Reculez le zoom, on ne voit rien !
L'image prit du recul, et
ce que vit Trump le plongea dans un état de contrariété avancée.
Comment ce putain d'enfoiré de bouffeur de riz avait-il fait ?
L'ensemble du pays
autrefois nommé Corée du Nord se détachait de la presqu'île, la
transformant de fait en île, et s'allongea, étrangement, telle une
entité vivante, en exhibant des milliers de bras tentaculaires. Les
conséquences de cette incroyable mutation furent violentes.
Sur l'écran radar, les
ovales de la flotte américaine disparurent l'un après l'autre. Le
téléphone sonna. Trump pressa le bouton de réception :
— Président, c'est...
c'est impossible. Nos croiseurs, nos destroyers, nos porte-avions...
ils sont balayés par des... bras à ventouse. Un vrai désastre !
Il coupa la
communication. Ainsi, cette salope de jaune avait atteint un stade de
technologie encore supérieur au nucléaire... qu'à cela ne
tienne...
Deux généraux
pénétrèrent dans le bureau. Ils firent mine de ne pas remarquer
son accoutrement.
— Président, notre
flotte est mise à sac ! La Corée semble... enfin... Elle a
fui le continent pour évoluer de façon indépendante. C'est
incompréhensible ! Quelles sont vos instructions ?
La réponse ne franchit
jamais ses lèvres.
La flèche d'un harpon
transperça le premier général, un lancer de couteau percuta le
crâne du second. Les deux hommes tombèrent au sol, dévoilant un
intrus à l'apparence ridicule.
Petit, replet, moulé
dans une combinaison de plongée, il s'avança vers Trump, d'un pas
chaloupé, rendu grotesque par les palmes qu'il chaussait, le sourire
aux lèvres.
— Est-ce ainsi que l'on
reçoit un chef d'état ? persifla Kim Jong-un.
Le président américain
se présenta devant son ennemi juré, en exposant sans vergogne son
membre en objection.
— C'est la meilleure
manière ! Fais-moi voir ce que tu as dans le slibard, petite
larve !
Le dictateur s'exécuta
volontiers. Il baissa son collant en néoprène et dévoila un sexe
atrophié et minuscule.
Trump ricana. Puis son
ricanement cessa soudain. Sortant du scrotum, un organe secondaire
s'éleva, portant le pénis du coréen à des proportions
impossibles. Un véritable bras s'érigea devant lui, jusqu'à auteur
de visage.
— Je vais t'apprendre à
me défier, menaça Trump.
— Je n'ai besoin
d'aucune leçon, contra Jong-un.
Le coréen arracha le
reste de sa tenue, et entama une affreuse mutation. Ses bras
s'allongèrent démesurément, ses jambes s'arquèrent, devinrent
molles, et se transformèrent en tentacules. Son torse gonfla, gagna
en volume, atteignant des proportions insensées. Il emplit bientôt
un tiers de la salle, laissant frétiller des excroissances
caoutchouteuses autour de lui. L'ignoble créature poussa un cri
strident, sorte de souffle hivernal empli de haine.
La stagiaire perdit
connaissance. À contrario, le président américain observa la
transformation, fasciné. Cette enflure de jaune avait frayé avec
les puissances ancestrales ! Le pays tout entier avait rejoint
les shoggoths, il s'agissait d'une réussite impressionnante.
Pourtant, devant la
créature fantastique qui s'avançait vers lui, agitant ses membres
épais tels des fouets prêts à le lacérer, le président américain
gardait son calme.
Trump se mit à fulminer.
De la bave s'échappa de sa mâchoire prognathe. Ils se mit à
gonfler et à déployer des centaines de protubérances
tentaculaires. Une gueule monumentale s'extirpa de cette masse de
chair en mutation, et dévoila d'énormes crocs, prêts à
déchiqueter les viandes...
Les deux entités se
ruèrent l'une sur l'autre. S'ensuivit un combat que nul témoin ne
put retranscrire. La petite Selena dormait d'un sommeil profond et
agité de cauchemars...
Certains habitant de
l'île de Guam prétendirent qu'une forme affreuse avait été
expulsée à travers ciel, pour être bannie hors de notre planète,
d'autres affirmèrent qu'un objet non identifié avait sombré dans
les profondeurs de la mer des Philippines, si loin que nul ne put
assister à son point de chute.
Officiellement, les deux
créatures s'annihilèrent, et disparurent de la surface de notre
monde.
Pourtant, chacun savait
que tapi dans les entrailles de la mer, ou de l'espace, les grands
cons de l'univers sommeillaient, prêts à revenir à la première
occasion...
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